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« Plus on avance en niveau de compétition, moins les femmes sont présentes »

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08/03/23
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« Plus on avance en niveau de compétition, moins les femmes sont présentes »

Quelle est la place des femmes dans la course au large ? Quel regard les femmes du team MACSF portent-elles sur leur profession ? Quels défis les femmes doivent-elles relever dans le milieu de la voile ? Cette journée internationale des droits des femmes est l’occasion pour Isabelle, skipper MACSF, Marine, coordinatrice générale du team, Caroline, responsable communication team technique et Aurélie, responsable sponsoring et communication MACSF, d’échanger sur ces sujets qui dépassent largement le cadre de leurs activités professionnelles.

« J’ai la chance de faire partie d’une équipe aux antipodes du machisme ! » - Marine Viau, coordinatrice générale du team MACSF

Quel est votre parcours dans le milieu de la voile ?

 

Caroline : Pour moi, tout a commencé en 2016 à Lorient lors d’un stage en communication auprès de Team France Jeune, l’équipe de jeunes régatiers formés pour rejoindre la filière d’excellence en voile sportive. Avec eux, j’ai vécu mon premier Tour de France à la Voile en Diam 24. J’ai ensuite continué de suivre l’équipe lors de ma dernière année de Master (en alternance), avec une participation à la Red Bull Youth America’s Cup 2017 en guise de final ! C’était une expérience intense et très formatrice. A la sortie de mes études, je me suis rapidement lancée en freelance dans le domaine de la communication. Peu de temps après, j’ai reçu un appel d’un certain Alain Gautier, me demandant si j’étais disponible pour rejoindre l’équipe en IMOCA aux côtés d’Isabelle. Cela fait aujourd’hui cinq ans que je vogue à leurs côtés en tant que responsable communication pour Lanic Sport team !

 

Isabelle : Cela fait plus de vingt ans que je travaille dans la voile. Fin 2001, j’ai passé mes diplômes pour être skipper professionnel. J’étais monitrice de voile pour des écoles de croisières et j’ai aussi fait des convoyages pendant presque deux ans avant d’acheter mon premier mini 6.50 et de me lancer dans l’aventure de la course au large. 

Lorsque j’ai commencé à travailler début 2002 avec mes diplômes en poche, j’ai proposé mes services dans les chantiers navals pour aider à faire du bricolage. A l’époque, il y avait une agence d’intérim dédiée au monde maritime et le premier job que l’on m’a confié alors que j’étais skipper pro était de nettoyer un bateau avec deux autres filles ! J’ai accepté car je voulais travailler. J’ai rencontré l’équipage qui s’occupait du chantier et eux m’ont embauchée en direct pour me proposer un poste en lien avec mes compétences et diplômes.

Cet exemple est extrêmement révélateur d’un certain regard que l’on porte sur les femmes et ça, pas seulement dans le milieu maritime, mais dans le monde du travail manuel en général. 

Cette anecdote a vingt ans et la qualité perçue d’une femme était plus de manier une éponge qu’un tournevis !

 

Marine : Moi aussi, j’évolue dans le milieu de la voile depuis bientôt vingt ans, dont quinze à temps plein ! J’ai démarré du côté technique en tant que préparatrice. Malheureusement, j’ai développé au bout de deux ans une allergie aux résines, m’empêchant de poursuivre sereinement mon travail sur les chantiers. J’ai donc repris mes études pour me réorienter vers les langues, en décrochant un diplôme de traductrice anglais espagnol. Par la suite j’ai travaillé pour différentes équipes et organisateurs de course en assurant des missions de coordination et gestion de projets en France et à l’étranger (OC Sport, Groupama, Volvo Ocean Race, Oman Sail, Le Souffle du Nord…). J’ai finalement rejoint le team Voile MACSF en avril 2019, sous la casquette de coordinatrice générale.

 

Aurélie : Le groupe MACSF est engagé dans la voile depuis 1979. J’ai découvert la voile de haut niveau en intégrant la mutuelle en 2011 et de façon plus intense lors de notre premier Vendée Globe en 2016. Depuis 2019 avec le partenariat avec Isabelle Joschke, c’est un projet à plein temps voile qui occupe l’équipe sponsoring. Sans compter mes nombreux stages d’Optimist, petite, aux Sables d’Olonne. Ça compte aussi comme expérience, non ? 

 

Quel regard portez-vous en tant que femmes sur vos professions ? Et sur celles-ci dans le milieu de la voile ?

 

Caroline : A vrai dire, c’est une question que je ne me suis jamais vraiment posée… S’il est vrai que les femmes sont très représentées dans la profession - la voile ne faisant pas exception - la communication est selon moi aussi bien une affaire d’hommes que de femmes ! Il s’agit surtout d’une question de curiosité, d’enthousiasme et de compétences à l’égard de notre métier et du domaine d’activité au sein duquel nous évoluons.

 

Isabelle : Les décideurs sont des hommes. En voile loisirs auprès des enfants, on a autant de filles que de garçons. En revanche, dans la voile sportive, il y a plus de garçons que de filles. Et plus on avance en niveau de compétition, moins les femmes sont présentes. 

Dans la course au large, il y a entre 5 et 10 % de femmes. C’est une proportion qui n’a pas évolué en vingt ans. C’est un fait de société. Notre société n’est pas organisée pour que les femmes soient aussi nombreuses que les hommes dans mon métier. Ce sont les femmes qui s’occupent des enfants globalement. Ce sont les hommes qui font carrière et les femmes sacrifient la leur pour s’occuper de leur famille.

 

Marine : Au fil des années, les équipes se sont étoffées et les missions de coordination / logistique sont devenues des professions dédiées. Nous sommes aujourd’hui assez nombreuses à tenir ces rôles au sein des teams. De manière générale, beaucoup de postes se sont ouverts aux femmes, à l’instar de celui de team manager, qui était auparavant souvent occupé par d’anciens navigants ou techniciens, majoritairement des hommes. Aujourd’hui, la logique est différente et l’on recrute des personnes avec des profils bien spécifiques pour assurer ces fonctions à responsabilité, avec des compétences en gestion humaine et économique à part entière. De ce fait, les femmes peuvent profiter aujourd’hui d’une reconnaissance plus naturelle, reposant avant tout sur leurs compétences et savoir-faire.

 

Aurélie : Côté sponsors, je dirais que c’est un univers plutôt mixte, à l’image de la représentation femmes / hommes dans l’entreprise qui sponsorise. Ici à la MACSF, l’équipe sponsoring est 100 % féminine. Mais cela n’a pas toujours été le cas. Comme le souligne Marine, de la même façon que pour les teams techniques, on recrute désormais côté sponsors des personnes avec des profils bien spécifiques pour assurer ces projets d’envergure, à fort impact pour les marques et leur notoriété. Ils nécessitent des compétences diverses car les enjeux sont multiples : humaines, sportives, financières et techniques. Il s’agit donc bien, à mon sens, de profils et de compétences spécifiques et non de genre.

 

Selon vous, quels sont les défis à relever pour les femmes dans le milieu de la voile ?

 

Caroline : Bien que les femmes soient encore peu nombreuses dans le milieu de la voile, il me semble que les lignes bougent. On voit aujourd’hui des femmes préparatrices, responsables communication, navigatrices, team managers… Si la légitimité des femmes n’est plus à prouver dans ces domaines, je pense qu’il s’agit surtout d’une question de confiance en soi, car il faut savoir prendre sa place et s’affirmer au sein d’un monde à dominante masculine ! Pour autant, je n’ai jamais rencontré de situation machiste ou sexiste au cours de mes différentes expériences dans le milieu. Au contraire, une présence féminine est souvent appréciée au sein des teams, car elle favorise un brassage d’expériences, de points de vue et de modes de fonctionnement complémentaires entre les hommes et les femmes.

 

Isabelle : Ce sont les mêmes défis à relever qu’à l’échelle de la société. Il faut pousser les filles à faire de la compétition et à se dépasser. Il ne faut surtout pas faire de différence entre un garçon et une fille justement !

 

Marine : Nous travaillons dans un milieu événementiel, avec des métiers exigeants de par la disponibilité et la flexibilité qu’ils imposent. Cela peut représenter un frein pour certaines femmes lorsqu’elles deviennent mamans. Car traditionnellement encore, ce sont souvent les femmes qui mettent leur carrière entre parenthèses lorsqu’elles ont des enfants. Il devient donc plus difficile pour elles de s’investir à 100 % dans leur carrière. Néanmoins, j’ai commencé à travailler pour le team Voile MACSF alors que j’avais des jumeaux en bas âge et que j’étais enceinte de sept mois ! Dans de telles conditions, peu d’employeurs auraient pris le risque de m’embaucher. J’ai la chance de faire partie d’une équipe aux antipodes du machisme ! Un autre défi, selon moi, concerne la proportion des femmes au sein des équipes techniques. En l’espace de vingt ans, les chiffres ont très peu évolué à ce niveau, alors que l’on recense aujourd’hui davantage de femmes dans les formations techniques (IUT, BTS). Je pense que les femmes n'imaginent pas qu’elles peuvent travailler pour des équipes de course et n’osent donc pas candidater. La voile n’est probablement pas un domaine plus machiste qu’un autre, mais il reste des progrès à faire !

 

Aurélie : L’engagement du groupe MACSF dans la voile vient valoriser la place de la femme et la mixité dans ce milieu qui reste masculin. Nous avons cette volonté d’inspirer d’autres jeunes femmes et hommes à s’aventurer dans cet univers sportif, mais aussi dans tous les types de métiers. Tout au long de l'année, le groupe offre la chance à des soignantes de réaliser leurs ambitions dans la voile de compétition et contribue ainsi à inverser la sous-représentation des femmes dans cette discipline. Il y a encore du chemin, quelques milles à faire…

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