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19/10/22Route du Rhum : flashback sur 44 ans d’histoire
La Route du Rhum rassemble tous les quatre ans les grandes figures de la voile, professionnels et amateurs, pour une traversée de l’Atlantique en solitaire au départ de Saint-Malo, destination Pointe-à-Pitre en Guadeloupe. A l’occasion de sa douzième édition – dont Isabelle Joschke prendra le départ le 6 novembre prochain – retour sur 44 ans de frissons, d’espoirs mais aussi de drames, qui ont marqué l’histoire de la célèbre course au large.
Née de la volonté du syndicat des rhumiers de Guadeloupe, désireux de mettre en avant son île et ses savoir-faire, et de Michel Etévenon, publicitaire et sponsor de compétition à la voile, la Route du Rhum est créée en 1978. Première transatlantique française en solitaire, la course est conçue comme celle de la liberté et de la diversité. Les monocoques et multicoques sont admis sans restriction de taille afin de naviguer sans contrainte. Ainsi, professionnels et amateurs se donnent rendez-vous à Saint-Malo pour s’aligner sur la même ligne de départ.
Des marins audacieux et une course légendaire
Le 5 novembre 1978, la première édition de la Route du Rhum est lancée. Parmi les 38 marins alignés sur la ligne de départ se mêlent des grands noms de la course au large et des jeunes prometteurs. Mike Birch et Michel Malinovsky marquent l’histoire de la course avec une arrivée au coude à coude, le premier s’imposant face au second avec un écart de 98 secondes après 23 jours de course.
Quatre ans plus tard, après le succès de la première édition, 52 navigateurs prennent le départ, dont de nombreux professionnels connus du grand public. Marc Pajot remporte cette édition, suivi de Bruno Peyron et Mike Birch, qui complètent le podium.
En 1986, 33 navigateurs se réunissent à Saint-Malo pour relever le défi du Rhum. Ce sera finalement Philippe Poupon qui terminera vainqueur de la course avec 48 heures d’avance sur ses concurrents, suivi de Bruno Peyron et Lionel Péan.
La quatrième édition sera celle d’une femme. Sur les 31 marins au départ, c’est Florence Arthaud qui remporte la victoire après 9 jours et 21 heures de course, et ce, malgré la perte de son électronique et de ses moyens de communication depuis les Açores. Elle entre dans la légende de la Route du Rhum en étant la première femme à s’imposer sur une course en solitaire. La petite fiancée de l’Atlantique, comme elle sera surnommée, aura tenu tête à Philippe Poupon et Laurent Bourgnon, qui terminent respectivement en deuxième et troisième position.
En 1994, ils sont seulement 24 à prendre le départ. Laurent Bourgnon remporte sa première Route du Rhum après un combat acharné avec Paul Vatine, Yves Parlier, Alain Gautier et Halvard Mabire, pourtant désignés comme favoris.
En 1998, parmi les 35 bateaux au départ, c’est Laurent Bourgnon qui entre dans la légende en remportant sa deuxième victoire consécutive et en établissant un nouveau record à 12 jours, 8 heures, et 41 minutes. Alain Gautier termine à la deuxième place, suivi de Franck Cammas. La même année, Ellen MacArthur remporte l’épreuve dans la catégorie monocoque.
L’édition 2002 rassemble 58 concurrents au départ de la course qui consacre cette année-là Ellen MacArthur en monocoque IMOCA.
En 2006, 74 solitaires s’alignent au départ de Saint-Malo. Lionel Lemonchois rallie Pointe-à-Pitre en 7 jours 17 heures et 19 minutes, se saisissant ainsi du nouveau record. Roland Jourdain et Jean Le Cam offrent un beau final pour la classe IMOCA.
En 2010, Franck Cammas décroche la victoire en 9 jours 3 heures et 14 minutes. Roland Jourdain termine vainqueur en IMOCA pour la deuxième édition consécutive.
Pour sa dixième édition, la Route du Rhum réunit 91 concurrents. Loïc Peyron termine en tête avec un nouveau temps de référence de 7 jours 15 heures et 08 minutes. François Gabart réalise un nouveau record en monocoque avec un temps de référence de 12 jours et 4 heures.
En 2018, pour les 40 ans de la transatlantique, 123 marins prennent le départ. En IMOCA, la victoire revient à Paul Meilhat. De nouveaux records sont établis dans quatre catégories sur six. Isabelle Joschke, à ce moment skipper Monin, participe à sa première Route du Rhum. La navigatrice démâte lors de la deuxième nuit de course, la contraignant à l’abandon.
Une épreuve impitoyable
En onze éditions, la Route du Rhum s’est imposée comme la reine des transatlantiques en solitaire. Pourtant, si elle a suscité son lot d’espoirs et engendré nombre d’exploits et de consécrations, la mythique course a également été marquée par ses drames et ses désillusions.
Le mois de novembre, réputé particulièrement rude, impose aux marins des conditions de navigation particulièrement difficiles. Au fur et à mesure que les dépressions s’abattent sur la flotte, les avaries entrent en scène et se succèdent. En 1982, les conditions contraignent 19 bateaux à abandonner. En 1986, après une succession d’avaries, plus de la moitié des bateaux ne franchiront pas la ligne d’arrivée. L’édition 1990 est également marquée par son lot de complications : seuls 11 bateaux franchiront la ligne d’arrivée sur les 31 au départ. En 1994, après une avarie de quille, Halvard Mabire chavire et déclenche sa balise de détresse : il sera secouru après une dizaine d’heures passées dans l’eau glacée. L’édition 2002 est marquée par le passage d’une dépression très creuse qui cause l’abandon de 30 concurrents sur les 58 au départ.
La Route du Rhum est également devenue tristement célèbre suite à des événements tragiques. Lors de la première édition, Alain Colas disparait en mer à bord de Manureva. Le navigateur et son bateau ne seront jamais retrouvés. Huit ans plus tard, la course déplore son second drame après la disparition du skipper Loïc Caradec à bord du trimaran Royale II.
Des évolutions techniques
Au fil des éditions, la Route du Rhum a consolidé sa légende en intégrant différentes évolutions techniques et réglementaires. Après la disparition de Alain Colas, tous les bateaux sont équipés de balises Argos à partir de 1982. Un PC presse est également créé pour permettre de suivre la course au plus près. La même année, les grands multicoques de plus de 20 mètres font leur apparition dans la flotte. En 1986, les bateaux au départ sont toujours plus grands puisque 13 d’entre eux mesurent plus de 23 mètres. A partir de 1990, la compétition, initialement fondée sur l’absence de restriction, impose finalement ses règles : la taille des bateaux est limitée à 60 pieds. Des figures emblématiques naviguant en 65 pieds comme Bruno Peyron, Francis Joyon et Hervé Laurent n’ont plus le droit de participer. D’autre part, dans une flotte en pleine mutation, les trimarans s’imposent. Pourtant, la grande nouveauté de 1990 réside dans l’arrivée du GPS (Global Positionning System) qui facilite la navigation des marins grâce au calcul d’itinéraires maritimes en fonction de la position en temps réel des bateaux et des données météo. A partir de 1994, la Route du Rhum distingue multicoques et monocoques. Les monocoques 60 pieds de nouvelle génération sont de plus en plus performants, pouvant même rivaliser avec les trimarans. En 2002, après le décès un an plus tôt de Michel Etévenon, l’organisation de course décide d’organiser des départs différés pour les monocoques et les multicoques. En 2006, les Class40 font leur apparition, permettant aux professionnels et amateurs de se rencontrer au sein d’une même course. En 2010, la limitation concernant la taille des bateaux, imposée depuis 1990, est abandonnée. En 2018, la catégorie Rhum Mono fait son apparition au départ de Saint-Malo.
Pour la douzième édition de la Route du Rhum – Destination Guadeloupe, 138 navigateurs relèveront à leur tour le défi de la mythique course qui ne cesse de faire rêver les navigateurs et vibrer le public. Parmi eux, Isabelle Joschke, skipper de l’IMOCA MACSF, qui compte saisir l'opportunité pour prendre sa revanche sur l’impitoyable transatlantique et donner le meilleur d’elle-même jusqu’à Pointe-à-Pitre. Rendez-vous pour le départ au large des côtes malouines le 6 novembre à 13h02.
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Un récit documenté par © Rémi Lasnier.